Retour

29

Déc 2020

Les O C vont devoir se réinventer - Périclès Group
  • Articles et presse

Le nouveau visage de la Protection sociale – épisode 2 : les impacts actuariels et le suivi des risques

La pandémie de la Covid-19 a bouleversé le marché de l’assurance Santé et Prévoyance. Les conséquences sanitaires et économiques de cette crise vont marquer de façon durable ce secteur. L’arrêt brutal de l’activité des entreprises durant le confinement a généré des effets jusque-là inconnus des professionnels de l’assurance. Le suivi des risques joue désormais un rôle essentiel dans la quantification des impacts de cette crise et sur la mesure des capacités de résilience des organismes assureurs.

Aujourd’hui : des conséquences déjà mesurables

Les répercussions techniques de la pandémie sont très contrastées en fonction des risques. La mise en place du confinement a été bénéfique pour le risque santé avec une baisse de la consommation durant cette période comprise entre -60% et -70% et allant jusqu’à -90% pour les postes dentaire et optique. Même si des effets de rattrapage sont visibles depuis la fin du confinement, la mise en place des restrictions sanitaires a conduit à une diminution de l’offre de soins et limite le retour à la normale des consommations de soins. Les professionnels de santé tirent cependant la sonnette d’alarme en rappelant que cette absence de soins concerne également les actes de prévention et de dépistage pouvant conduire à une dégradation future de l’état de santé des assurés. En terme de sinistralité, l’exercice 2020 promet d’être une année bénéficiaire pour les organismes assureurs. Cela n’a pas échappé au gouvernement qui souhaite mettre à profit les gains techniques dans le cadre du financement du coût de la pandémie.

En prévoyance, le constat est tout autre. En terme de décès, les victimes de la pandémie sont dans plus de 90% des cas des individus de plus de 65 ans. Les assurances collectives et les produits emprunteurs seront donc peu touchés contrairement aux portefeuilles de produits obsèques qui concentrent des populations plus âgées.

Les conséquences sur le risque incapacité sont les plus difficiles à mesurer. En effet, plusieurs types d’arrêts de travail ont été mis en place durant la pandémie, il est notamment possible de citer les arrêts pour garde d’enfant ou encore les arrêts pour isolement des personnes fragiles auxquels s’ajoutent ceux directement liés à la Covid-19. Au global, les CPAM ont enregistré un doublement du nombre d’arrêts durant la période de confinement. Les arrêts de travail hors Covid-19 ne sont, la plupart du temps, pas pris en charge par les organismes d’assurance. Il est cependant possible de citer certaines institutions de prévoyance qui par mesure de solidarité ont élargi l’indemnisation des arrêts de travail à l’ensemble de ces causes. Pour les arrêts de travail directement liés à la Covid-19, à la vue de la durée moyenne d’hospitalisation conservée par les épidémiologistes (10.4 jours), seuls les contrats à franchise courte verront leurs résultats se dégrader.

Arrêt de travail - Périclès Group

La Covid-19 a mis en évidence une notion oubliée des modèles pandémiques des assureurs : la perte importante de cotisations induite par la mise à l’arrêt de l’activité économique. Ce manque à gagner, notamment créé par la généralisation du chômage partiel et la fragilisation de la trésorerie des entreprises représentent les risques les plus importants pour les assureurs.

Pour finir, les faillites d’entreprises vont également avoir un impact non négligeable sur les comptes de résultats. Les difficultés dans le recouvrement des cotisations dues vont se multiplier et les futurs licenciements économiques vont augmenter le coût de la portabilité des droits en offrant une couverture à titre gratuit aux salariés licenciés.

Demain : le renouvellement et la campagne commerciale

Sur ce constat, se pose la question de la gestion des renouvellements et des réponses aux appels d’offres.

Dans le cadre des produits collectifs, la campagne de renouvellement sera particulière en 2020. Les effets de la Covid-19 n’apparaitront pas directement dans les comptes 2019 servant de base aux calculs et des anticipations de pertes et de gains sur l’exercice 2020 devront être intégrées. De nouvelles politiques de mutualisation des résultats verront probablement le jour avec une augmentation des analyses globales par groupement de risque pour que les économies réalisées sur la santé viennent compenser les pertes engrangées en prévoyance. Cela laisse envisager des négociations serrées entre le porteur de risque, l’apporteur, le directeur des ressources humaines ou encore les partenaires sociaux des branches professionnelles. Les acteurs de l’assurance devront faire preuve d’une grande pédagogie dans la présentation des comptes, la justification des majorations tarifaires et dans les éventuelles sécurisations juridiques nécessaires des contrats.

Les stratégies commerciales vont vraisemblablement évoluer dans ce nouveau contexte vers une orientation défensive. Les stratégies offensives qui se basent notamment sur la captation de clients avec des résultats bénéficiaires seront plus difficiles à mettre en place. Sur le risque santé, les économies du confinement sont conjoncturelles et ne pourront pas bénéficier au repreneur qui sera, de fait, moins à même de proposer des baisses tarifaires. Pour la prévoyance, en plus de l’augmentation de la sinistralité qui entrainera de fait une augmentation des cotisations, le coût du financement de la revalorisation des prestations futures pourra freiner d’autant plus les transferts de contrats. Ce coût supplémentaire en cas de changement d’assureur et porté par les entreprises va continuer de croître par l’effet couplé de la baisse des taux d’intérêt d’emprunt d’État et la hausse du nombre d’arrêts de travail.

Assurance Santé - Périclès Group

En plus des notions de garanties, de résultats et de population assurée, la solidité financière de l’entreprise ou de la branche professionnelle deviendra la nouvelle variable à étudier avant de répondre à des appels d’offres aux chiffres d’affaires espérés importants. Cette étape de contrôle des entreprises n’est pour le moment réalisée que par quelques acteurs de la place. Ces vérifications complémentaires, qui passent notamment par l’utilisation d’outils de scoring des sociétés, sont pourtant essentielles car elles permettent d’éviter d’engager des négociations avec des sociétés qui risquent de se trouver en difficultés lors du recouvrement des cotisations santé et prévoyance.

La résilience, une qualité nécessaire

Les organismes assureurs devront faire preuve de résilience tout au long de cette crise. L’étude de la pertinence des politiques commerciales initialement actées sera nécessaire pour trouver un compromis entre un apport de chiffre d’affaires et le coût en capital qui lui est associé dans un contexte dégradé.

La stabilité de l’organisme assureur devra également être anticipée en cas de deuxième vague. Cela se fera par l’ajout de nouveaux scénarios aux simulations ORSA. Ceux-ci permettront d’associer des chocs de hausse de sinistralité, de baisse de cotisations et de chute brutale des actifs financiers pour étudier l’impact sur la couverture du SCR.

Ainsi, un pilotage de l’activité par le biais de l’analyse des indicateurs de solvabilité semble être une des clés pour résister aux épreuves de cette pandémie.

Guerric Bras

Partagez cet article : twitter

navigation

Pour partager cette fiche, entrez une adresse mail valide :

Envoyer